L’IA et le futur du travail: on se met au boulot ou bien ?

Voilà un article sur une thématique qui m’est très chère, puisque je la vis au quotidien avec Simplon : le futur de l’emploi à l’heure de l’IA, et sur un sujet pas facile et controversé.

Je suis tombé dernièrement sur une étude de l’OCDE qui anticipait la disparition de près de 15 millions d’emplois dans les 20 prochaines années à cause (ou grâce) des progrès exponentiels de l’IA et de l’automatisation. Rassurez-vous tout de suite, je ne pense pas qu’on sera tous chômeurs, contrairement à ce que prédisent certains « prophètes de malheur » plutôt pessimistes. En fait, ces études prospectives oublient souvent de mentionner que de nouveaux emplois vont aussi être créés, en nombre, par les mêmes technologies qui en détruisent, et qu’elles vont aussi transformer la nature même du travail pour la majorité d’entre nous.

Midjourney – Artificial Intelligences and Humans peacefully working together, Utopic Cartoon style –s 50 –v 5.2

Pour le meilleur et pour le pire.

Côté meilleur, l’IA va nous permettre de déléguer les tâches pénibles, répétitives et sans valeur ajoutée au robots et aux algorithmes. On aura plus de temps pour se concentrer sur la créativité, l’innovation, les relations humaines et le sens au travail. L’IA pourra aussi augmenter nos capacités cognitives, améliorer notre productivité et personnaliser nos expériences.

Côté pire, les emplois peu qualifiés et ceux basés sur des compétences facilement automatisables risquent de disparaître. De plus, la frontière entre vie privée et vie professionnelle risque de s’estomper définitivement avec des IA de plus en plus intelligentes et omniprésentes. On aura aussi affaire à la dépendance croissante aux machines et à la perte de certaines capacités humaines (calcul mental, orientation, mémorisation, etc.).

Pour conclure, je reste convaincu que l’humain restera irremplaçable. La créativité, l’empathie, la collaboration, la pensée systémique ou encore la sagesse sont des capacités qui font notre humanité. À nous d’utiliser l’IA pour les développer et non les remplacer.

Le succès de demain appartiendra à ceux qui sauront allier l’humain et la machine, en faisant interagir le meilleur des deux mondes. Notre avenir n’est pas de nous faire remplacer par les robots mais de travailler avec eux, en complémentarité. La clé sera la formation tout au long de la vie pour développer ces « complementary skills » et d’autres compétences d’avenir.

Midjourney – Artificial Intelligence taking over human jobs, Dystopic cyberpunk style –s 50 –v 5.2

Sacré Benedict…

L’article « AI and the automation of work » de Benedict Evans m’a également marqué car pour une fois il discute de l’impact de l’IA générative, des grands modèles de langage (LLM) et de ChatGPT sur l’avenir du travail et de l’automatisation. En voici les points principaux :

  • Changement Générationnel : L’IA générative, les LLM et ChatGPT sont considérés comme un changement générationnel dans ce que nous pouvons automatiser avec le logiciel. Ils devraient apporter plus d’automatisation et de nouveaux types d’automatisation.
  • Automatisation et Emplois : L’auteur soutient que bien que l’automatisation puisse éliminer certains emplois, elle en crée également de nouveaux. Cela a été la tendance au cours des 200 dernières années. Cependant, la crainte est que les nouveaux emplois créés par l’IA et l’automatisation ne soient pas aussi prévisibles ou aussi nombreux que les emplois qui sont automatisés.
  • Le Sophisme de la masse de travail : L’auteur discute du « sophisme de la masse de travail », qui est la fausse idée qu’il y a une quantité fixe de travail à faire, et que si une partie du travail est prise par une machine, il y aura moins de travail pour les gens. Cependant, si une tâche devient moins chère grâce à l’automatisation, plus de personnes peuvent se la permettre, et elles ont plus d’argent à dépenser pour d’autres choses, créant de nouveaux emplois.
  • Le Paradoxe de Jevons : L’auteur introduit le paradoxe de Jevons, qui suggère que lorsque la technologie rend les processus plus efficaces et moins chers, nous avons tendance à en utiliser davantage, ce qui entraîne une augmentation de la consommation. Ceci a été appliqué au travail de col blanc depuis 150 ans.
  • La Vitesse d’Adoption : L’auteur souligne que l’adoption de technologies d’IA comme ChatGPT se fait beaucoup plus rapidement que les technologies précédentes comme l’internet ou les PC. Cependant, l’auteur soutient que le remplacement ou l’automatisation des outils et des tâches existants n’est pas trivial et prendra du temps.
  • Le Taux d’Erreur : L’auteur discute du taux d’erreur des technologies d’IA, affirmant que bien qu’elles puissent répondre à ‘tout’, la réponse peut être fausse. C’est parce que les technologies d’IA ne font pas une recherche dans une base de données mais créent un modèle. Comprendre cela est crucial pour éviter les erreurs.
  • L’Avenir du Travail : L’auteur suggère que les LLM détruiront, déplaceront, créeront, accéléreront et multiplieront les emplois tout comme les technologies précédentes l’ont fait. Cependant, la vitesse de ce changement pourrait causer plus de douleur de friction et rendre plus difficile l’adaptation.
  • La Question de l’AGI : L’auteur conclut en discutant du potentiel de l’Intelligence Artificielle Générale (AGI), un système qui pourrait faire tout ce que les gens peuvent faire sans aucune limitation. Si un tel système existait, il pourrait potentiellement remplacer les humains dans de nombreux emplois. Cependant, l’auteur soutient que nous sommes loin d’atteindre l’AGI, et jusqu’à ce que nous y arrivions, nous avons affaire à une autre vague d’automatisation.

Mais que disent les études (lol) ?

D’après des études récentes menées par le MIT, le NBER, Goldman Sachs, OpenAI/University of Pennsylvania et Accenture, de nombreuses professions dans les pays développés seront fortement impactées par le travail assisté par l’intelligence artificielle (IA) ou par son remplacement. Bien que les impacts varient considérablement selon les professions, l’IA a le potentiel d’affecter 80% de la main-d’œuvre aux États-Unis et, selon un rapport de Goldman Sachs, d’augmenter le PIB mondial de 7%. Une étude d’Accenture montre que, parmi 22 groupes professionnels, 40% des tâches actuelles présentent un fort potentiel d’automatisation ou d’assistance, notamment dans les secteurs des services financiers, des logiciels et des plates-formes, de l’énergie, et des communications et des médias.

Les gains potentiels de productivité sont significatifs. Même avec des mises en œuvre relativement précoces de l’IA sans contexte d’entreprise, une étude récente du MIT a montré que la productivité des travailleurs sur des tâches typiques de bureau pourrait être améliorée de plus de 50%, les tâches de codage pouvant être réalisées deux fois plus rapidement grâce à l’IA. Les résultats varient considérablement selon les fonctions : dans le support client, des études ont montré une augmentation de 14% du nombre de problèmes traités par heure avec l’assistance de l’IA, et les économistes ont observé une augmentation de productivité de 10 à 20%. En revanche, dans les ventes, les représentants du développement commercial (RDC) peuvent envoyer 15 e-mails personnalisés et étudiés par heure avec l’assistance de l’IA, contre trois par heure manuellement, soit une différence de 5 fois. À mesure que les modèles s’améliorent et qu’ils ont accès à des données d’entreprise plus holistiques, ces chiffres augmenteront davantage.

Les travailleurs moins productifs ou nouvellement embauchés bénéficient de manière disproportionnée de l’IA. Selon l’étude du MIT sur les tâches de bureau, non seulement tous les travailleurs étaient plus productifs avec l’IA, mais les gains étaient beaucoup plus importants pour les travailleurs moins productifs au départ, et leur taux d’amélioration était plus élevé. Le même constat a été fait dans la recherche du NBER sur la productivité des centres d’appels, où les opérateurs des centres d’appels pouvaient choisir des réponses générées par l’IA pour répondre aux demandes d’assistance. Dans cette dernière étude, le modèle était continuellement amélioré grâce aux réponses des opérateurs hautement qualifiés, ce qui permettait de partager les connaissances tacites des travailleurs les plus qualifiés à l’ensemble de la main-d’œuvre.

Et le « AI & Skill-Biased Technical Change » alors ?

Dernier truc que j’ai envie de vous partager car ça m’a marqué, c’est que des recherches confirment qu’il y a bien un « biais » dans les IA au niveau de leurs impacts sur les compétences et le monde du travail, mais c’est pas celui qu’on imagine. En effet, le « changement technologique biaisé en faveur des compétences » est une évolution validée par la recherche en 2016 et en 2023 qui démontre que les travailleurs qualifiés sont favorisés car cela augmente leur productivité et donc leur demande relative, en particulier avec l’adoption de nouvelles technologies d’information. Cette tendance a des implications importantes pour la répartition des revenus et peut contribuer à l’augmentation des inégalités salariales. Une étude portant sur 16 pays européens entre 2011 et 2019 a révélé que la part d’emploi a généralement augmenté dans les métiers plus exposés à l’intelligence artificielle (IA), en particulier pour les métiers qui emploient une proportion plus élevée de travailleurs jeunes et qualifiés. Cependant, cette tendance n’est pas uniforme et varie en fonction du rythme de diffusion de la technologie, du niveau d’éducation, de la régulation du marché des produits et des lois de protection de l’emploi. Aucune preuve solide n’a été trouvée d’une relation entre les salaires et l’exposition potentielle aux nouvelles technologies.

Cela est assez intéressant je trouve non ? Mais les choses ne sont pas claires hein ?
Donc ça veut dire qu’on a pas fini d’en parler, ici et ailleurs.

Et vous, qu’en pensez-vous?

Travails, familles, patries (was : Mein Arbeit Macht Meine Frei)

Je sais pas pourquoi ce sont 2 idées nauséabondes qui, en les détournant, ont fini par donner ce titre bizarre. C’est comme ça, peut-être les scores récents du Front National, la campagne Buisson(esque) défaite de Sarkozy et les manifestations quotidiennes de haine et fascisme que l’actualité nous présente. Ou le fait que j’ai souvent mes idées d’articles comme ça sans y penser vraiment et qu’ensuite il faut vite que je les écrive et que je les publie, sans toujours bien les relire. Le blogging a toujours eu pour moi cette fonction, cet intérêt. Toujours est il que je suis parti, pour mieux les ridiculiser et tenter si c’est possible de les rendre moins horribles, de l’odieuse devise qui figurait à l’entrée du camp de Buchenwald et du triptyque pétainiste qui s’était substitué au républicain « Liberté, Egalité, Fraternité ».

Pour parler de quoi cette fois-ci ?

De mon rapport au travail, de la place qu’il a par rapport à ma vie personnelle et du rôle central que possède pour moi la famille, de mon besoin vital de liberté ainsi que des contraintes et des avantages de ma mobilité géographique, toussa quoi.

Par quoi commencer, par la raison pour laquelle j’écris au pluriel « travails, familles, patries ».

Au-delà de la faute d’orthographe volontaire et pseudo-stylistique, j’ai effectivement de nombreuses activités qu’on peut considérer comme « professionnelles », de manière synchrone, je suis en effet cofondateur et associé de LIMITE, une agence pure-player en communication responsable, pour laquelle j’interviens sur le volet digital de ses clients publics, privés ou non-marchands ; j’ai une activité de freelance en tant que planneur / consultant / newbizz digital pour des agences et des annonceurs qui ne sont pas en concurrence avec LIMITE, notamment au travers d’Agilteam et de ma structure FBardeau Conseil ; je poursuis également le travail engagé avec la publication du livre « Anonymous » co-écrit avec Nicolas Danet et publié chez FYP par la rédaction d’articles, l’animation ou l’organisation de conférences ou d’ateliers sur le sujet de l’hacktivisme et de la cyberculture et du digital au sens large… C’est pour ça que je dis que j’ai plusieurs « travails » 😉

Ensuite « familles ». Ca peu paraître débile là aussi, car on peut dire qu’on en a toujours qu’une seule mais moi je dis que j’en ai plusieurs, ou que ma conception de ma famille est à géométrie variable et fonctionne en mode étendu. Ca n’est pas qu’une histoire de sang en tous cas mais aussi d’affinités. J’ai pourtant des parents et des parentés, des enfants (5 en tout, 2 d’un premier mariage qui ont 6 et 4 ans et demi, 2 qui sont dans ma vie grâce à mon 2ème mariage et qui ont 13 et 12 ans, et pour finir le petit dernier d’1 an que la vie nous a donné comme un cadeau à ma femme et moi). Donc c’est une belle famille recomposée qui, selon les semaines, est composée de 3 personnes (ma femme, notre fils et moi), de 5 personnes (nous 3 et les 2 enfants de ma femme) ou 7 (elle, moi et tous nos enfants). Et concernant les enfants, j’ai envie d’en adopter d’autres, et de monter, à terme, une ONG qui fédérerait des orphelinats autour du soin (ma femme est médecin) et d’Internet/des logiciels libres. Mais je pourrais dire aussi que je compte dans ma famille des amis, des qui sont physiquement proches de moi et d’autres que je vois moins malheureusement faute de temps. Et je pourrais également tout aussi facilement dire que je considère chaque femme et chaque homme dans ce monde comme un membre de ma famille tant leurs souffrances et leurs conditions m’affectent et déterminent pour beaucoup ma vision du monde, mes engagements, les priorités que je me fixe dans mes activités professionnelles et personnelles, mes lectures, ma façon de vivre au quotidien…

Dernier point d’explication, pourquoi « patries » ? Et bien parce que mes « travails » et mes familles se vivent simultanément, mais sur des territoires éclatés. Je suis en effet ce qu’on appelle un navetteur, qui passe beaucoup de temps dans les trains car je suis organisé selon une mobilité géographique pendulaire, mais pas comme un navetteur classique. J’ai 2 domiciles un à Paris, l’autre dans le Sud de la France, et j’y passe en gros une semaine sur 2 en période d’activité normale (l’été je suis plutôt dans le Sud ;-). A Paris je m’occupe en alternance de mes 2 premiers enfants, de LIMITE et de ses clients digitaux, et de certaines de mes autres activités (missions freelance, conférences, travail de recherche pour continuer à écrire des articles et des livres sur les hackers). Dans le Sud je continue à (télé)travailler pour mes activités professionnelles, parisiennes ou non. Les 2 territoires qui font le lien entre mes 2 domiciles, c’est le train dans lequel je travaille, je lis et souvent je dors (voyages de nuit en couchettes), mais surtout Internet et le cyberespace qu’il créé et que j’arpente depuis 15 ans à tel point que je m’y sens à la fois comme chez moi mais qu’il revêt toujours pour moi un caractère d’aventures et de découvertes permanentes. Voilà pourquoi « patries » : Paris, Carcassonne, SNCF, Cybéria j’avais un jour mis sur mon descriptif Twitter en forme de joke… mais ça n’en était pas vraiment une.

Alors tout ça pour quoi ? Quelle complexité pourrait-on se dire ! Quel éparpillement et quelle fatigue ! Quelle perte de temps tous ces trajets !

Et bien pour moi, et pour l’instant pour mes proches, pour mes clients, pour mes associés et pour le monde entier : c’est comme ça, et c’est bien comme ça jusqu’à ce que cela ne le soit plus et que j’agisse pour changer cette configuration. Car ce dispositif possède aussi de remarquables avantages personnels ou professionnels, et qu’il correspond à des envies autant que des besoins très forts et très importants pour moi. Le premier est qu’il me permet de « jouer sur tous les tableaux », c’est à dire d’avoir des activités professionnelles passionnantes et multiples, stimulantes car hétérogènes, et qu’il me ménage beaucoup de temps de travail chez moi (à Paris mais surtout dans le Sud) et énormément de flexibilité pour profiter de mes enfants (à Paris, mais aussi dans le Sud quand on est 3 ou 5 ou 7), et bien entendu de ma femme (week-ends, vacances, moments « off »).

Tout ça n’est possible que parce que je ne suis pas salarié, que parce que j’ai des activités différenciées dont aucune ne me prend suffisamment de moi pour m’empêcher de vivre le reste de ce que je veux vivre. Et rien de cela ne serait possible sans le cyberespace. Internet m’a donné énormément à tous les niveaux, il m’a ouvert l’esprit, donné un travail, montré la voie et fait connaitre des choses qui ont changé ma vie, permis d’interagir et de rencontrer des gens extraordinaire, et il me permet de m’organiser différemment, sur plusieurs lieux, c’est aussi pour cela que je suis libre et que j’apporte des choses à mes clients.

Donc paradoxalement, ce qui pourrait apparaître comme un déséquilibre ou une instabilité est en fait un agencement stable. Il l’est pour mes associés, mes clients et mes partenaires/équipes, qui savent que ma réactivité et ma valeur ajoutée ne sont pas affectées par mon mode de vie mais qu’il faut s’organiser et aimer les nouvelles technologies numériques (téléphone, visio, chat, pads, mails), et il l’est pour ma famille et mes amis dont je peux profiter pleinement, là aussi pas toujours physiquement (vive les réseaux sociaux, le téléphone, le mail) et pas autant que ce que je souhaiterais.

Je travaille beaucoup et un peu tout le temps, et je déconnecte rarement même si je me soigne de mieux en mieux à ce sujet, grâce à ma femme et au soleil du Sud… mais c’est aussi pour cela que je suis libre, que je fais plein de choses passionnantes et que j’ai développé des expertises très fortes qui me permettent de bien gagner ma vie et d’en profiter un maximum auprès de ceux que j’aime et au service de mes engagements.

Il y a bien pire…